Chevrolet Fleetline Aerosedan 1948

Mario Lacroix Auteur : Mario Lacroix 30 Mar 2022

Je vous emmène aujourd’hui faire un voyage dans le temps dans les années ’40.

En 1941 General Motors offre dans plusieurs de ses divisions un nouveau design moderne d’allure aérodynamique qu’on appelle à l’époque le style Torpedo. Il s’agit d’une ligne de toit que l’on connaît aujourd’hui sous le nom de Fastback. Le succès est tel, que pour l’année modèle 1942, Chevrolet emboîte le pas, et en offre également une version de son modèle dès septembre 1941. La réaction du publique est excellente, mais cependant un nuage se pointe à l’horizon.

Le 7 décembre 1941, c’est l’attaque de Pearl Harbor, ce qui plonge les États-Unis dans la 2ième guerre mondiale. Dès janvier 1942, le gouvernement américain ordonne que les usines des manufacturiers automobiles participent à l’effort de guerre. Les modèles fabriqués en décembre 1941 et janvier 1942 sont d’ailleurs un peu différents. Ils sont dépourvus de chrome, car l’armée en a besoins. Les pare-chocs, enjoliveurs de roues, grille avant, poignées de portes, ainsi que toutes les commandes d’intérieur des voitures sont plutôt peintes de couleurs contrastantes. On appelle ces modèles Blackout. La production automobile ne reprendra qu’en 1946, et ce, lentement, à cause du réaménagement nécessaire des usines et du manque de matière première (métal, caoutchouc, etc…) pour produire les automobiles.

Le retour des beaux jours

Comme tous les autres manufacturiers automobile en 1946, Chevrolet reprend ses modèles de 1942 avec une calandre différente tout au plus. Ils seront offerts jusqu’en 1948 avec de subtils changements d’une année à l’autre pour les distinguer. En 1948, Chevrolet offre trois gammes de sa voiture. La Stylemaster qui est la version de base, la Fleetmaster qui est un peu plus équipée, et la Fleetline qui est le haut de gamme. Les Chevrolet sont offerts dans plusieurs configuration, cependant la version Fastback, ou Aerosedan comme Chevrolet l’a nommé, n’est disponible qu’exclusivement dans la ligne Fleetline. À part sa ligne de toit particulière, ce modèle se distingue par ses ailes avant qui se poursuivent jusque dans les portières, lui donnant un style streamline qui le rend assez unique. D’ailleurs, une portion de l’aile s’ouvre avec la porte.

Une histoire de famille

La voiture que vous voyez dans ces pages est ma plus récente acquisition. Je cherchais spécifiquement ce modèle depuis plusieurs années, mais en vain. Ils sont introuvables, surtout dans un état d’origine. J’aimais ce modèle particulier parce que je le trouvais spectaculaire, mais aussi la raison était que ce fût une des premières voitures que mon père ait acquis dans sa jeunesse. Il m’en a souvent parlé, me disant que c’était une des plus belle voiture qu’il ait possédée, même si au moment où il a acquise la sienne, elle n’était pas très récente, bien entendu il n’avait pas les moyens de se procurer une voiture neuve.

Conduire une auto des années ’40 est une expérience en soi, et je voulais vivre cette aventure, faire un retour dans le temps, à une époque où la conduite demandait au conducteur de prendre le contrôle total de sa voiture, ce qui n’est plus le cas avec les voitures d’aujourd’hui. Certains trouvent leur montée d’adrénaline à pratiquer un sport extrême, moi, c’est en conduisant une auto ancienne que je trouve ce plaisir!

De la Pennsylvanie en passant par Terre Neuve

Au moment où je me disais que je n’en trouverais jamais et que je ne cherchais plus vraiment, la chance m’a souri, j’ai trouvé la perle rare! Elle est dans une condition absolument exceptionnelle pour une voiture de 72 ans, et totalement originale. Elle provient de la Pennsylvanie, et elle a été importée au Canada dans les années ’80 par un type de Windsor en Ontario qui voulait une voiture pour se faire un Hot Rod. Mais une fois arrivée chez-lui quand il vu l’état et l’originalité du véhicule, il a changé d’idée, et l’a plaqué et a roulé avec tel quel pendant quelques années. Plus tard, il est tombé sur un Chevrolet coupé 1937 qui nécessitait une restauration complète, et se l’ai procuré pour réaliser son rêve de faire un Hot Rod avec. Mais pour financer son projet, il a dû prendre la décision difficile de se départir du Fleetline. C’est à ce moment qu’un monsieur de Terre Neuve l’a acheté, et l’a conservé pendant les 25 années qui suivirent.

Voulant commencer à réduire sa collection, il l’a mis à vendre l’été dernier. Après avoir discuté un long moment avec, et après avoir reçu plus de photos, j’ai décidé de m’acheter un billet d’avion et de me rendre sur place pour aller la voir.

Le début de mon périple

À mon arrivée à l’aéroport de St-John, Terre Neuve, le propriétaire de l’auto m’attendait avec son épouse, m’ont emmené au restaurant, puis m’ont fait visiter leur coin de pays, qui est absolument magnifique. Les gens sont tellement gentils là-bas, c’est incroyable! Mais quand nous sommes arrivé chez eux à Pouch Cove, à environ une vingtaine de minutes de St-John, l’émotion m’a envahie lorsqu’il a ouvert la porte de son garage et que j’ai aperçu la voiture. J’en voyais une de mes propres yeux pour la toute première fois à vie! J’ai d’ailleurs à ce moment eu une pensée pour mon père qui a courtisé ma mère avec une voiture identique dans sa jeunesse. Le lendemain, Le propriétaire de l’auto est venu me chercher à l’hôtel avec l’auto, et c’est moi qui l’a conduit pour se rendre chez-lui (après m’avoir donné un petit cours sur le fonctionnement de l’auto bien sûr).

La voiture était dans une condition si incroyable que je n’ai pas hésité à en faire l’acquisition. Elle a 46 000 miles, et tout porte à croire que c’est vraiment son vrai millage! Reste maintenant à s’occuper du transport, car Terre Neuve est une île qui est si loin de la terre ferme qu’aucun pont ne s’y rends. C’est un périple de 30 heures pour l’emmener à Québec. C’est dans un camion fermé que le voyage s’entreprends, dont 8 à 9 heures de bateau traversier jusqu’en Nouvelle Écosse, puis traverser le Nouveau Brunswick, pour arriver à Rimouski, et descendre jusqu’à Québec. Comment vous décrire ma joie quand j’ai enfin vu se pointer cet auto à Québec. Je n’oublierai jamais ce moment!

Côté mécanique, le moteur est un 6 cylindres en ligne de 216 pc. qui développe 90 hp @ 3300 tr/min avec un couple de 174 @ 1200 tr/min. La transmission est manuelle à 3 vitesses avec levier au volant. La première vitesse n’est pas synchronisée, cependant la deuxième et la troisième le sont. Le démarreur pour sa part est au pied, c’est une petite pédale à droite de l’accélérateur. Les voitures des années ’40 ont pleins de particularités comme celle-là qui les rendent unique et tellement agréable à conduire.

texte et photos S.Vézina Propriétaire

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